Il était censé révolutionner notre approvisionnement en gaz naturel... Le gaz de schiste a surtout pour le moment fait la Une des journaux français, au cœur d'un débat acharné entre les partisans de cette nouvelle ressource énergétique et ses détracteurs, inquiets de son impact sur l'environnement.
La politique énergétique en zig-zag
Petit retour en arrière : en mars 2010, Jean-Louis Borloo signe trois arrêtés autorisant la prospection de gaz de schiste sur de vastes territoires, qui s'étendent du Larzac à la Drôme en passant par les Cévennes et l'Ardèche. Les élus locaux, qui ne sont pas consultés, voient rouge. Les écologistes français s'emparent alors de l'affaire, et portent le sujet devant la Ministre en charge du dossier, Nathalie Kosciusko-Morizet qui annonce un moratoire de quelques mois. Mais la contestation ne faiblit pas. Mi-avril des milliers de personnes ont à nouveau défilé dans toute la France. Cette fois-ci, c'est le Premier Ministre François Fillon qui monte au créneau en annonçant l'annulation des permis déjà accordés, tout en laissant la porte ouverte à une exploitation future des gisements, avec d'autres techniques moins polluantes. L'examen d'une proposition de loi sur la question, selon la procédure d'urgence, est prévu le 10 mai.
Un potentiel économique et politique énorme
Mais la France est loin d'être le seul pays concerné par la polémique. Selon certains experts, les réserves mondiales en gaz de schiste seraient quatre fois plus importantes que les ressources en gaz conventionnel. Aux États-Unis, le gaz de schiste représentent aujourd'hui 12% de la production locale de gaz contre seulement 1% en 2000. Et pour l'IHS-CERA, un institut d'analyse sur les énergies, proche des milieux industriels, le vieux continent pourrait bien renfermer le même potentiel.
Au-delà de l'Hexagone, c'est donc bien l'Europe toute entière qui s'interroge sur cette source p
otentielle d'énergie, à l'heure où les prix du pétrole et du gaz conventionnel s'envolent. « Le gaz de schiste ainsi que d'autres formes de gaz non-conventionnels sont une opportunité pour l'Union européenne car ils peuvent contribuer à sécuriser nos approvisionnements, » confirme Marlène Holzner, porte-parole en charge de l'énergie pour la Commission européenne. « Bien sûr, la recherche et l'exploitation de ce type de gaz non-conventionnel doivent être menées selon les standards environnementaux européens ».
Situation en Europe
En Allemagne et au Royaume-Uni, des plans d'extractions sont examinés, et l'opinion publique n'est pas encore mobilisée sur ces questions. En Autriche, en Hongrie, en Pologne, les forages pour détecter le niveau des ressources ont d'ores et déjà commencé, sans provoquer plus de réactions que cela dans la population civile.
La Pologne, surtout, est surveillée de près, car elle posséderait, selon certains experts, des ressources phénoménales, qui pourraient en faire le « Qatar de l'Europe ». Malgré les mises en garde d'associations écologistes, comme WWF Pologne, qui s'inquiète de la « dévastation » de la terre, la société civile est là encore peu mobilisée.
Le gouvernement, lui, voit d'un bon très œil cette manne énergétique inattendue, dans un pays très dépendant du gaz naturel russe. « Pour le moment, nous tirons notre énergie du charbon, expliquait ainsi le Ministre des affaires étrangères polonais, sur France 24. Mais si nous commençons à utiliser du gaz de schiste, nous serons à même de remplir les critères de l'Union européenne en termes de diminution de nos rejets de CO2 ».