Les attaques de jaguars contre des tortues marines se multiplient dans le nord du Costa Rica et préoccupent les spécialistes. Ces chocs mortels mettent en évidence des déséquilibres écologiques majeurs et invitent à repenser la philosophie de préservation des espèces.
Quand les espèces menacées se dévorent entre elles
Les attaques de jaguars contre les tortues marines se multiplient dans le nord du Costa Rica et préoccupent les spécialistes. Ces chocs mortels mettent en évidence des déséquilibres écologiques majeurs et invitent à repenser la philosophie de préservation des espèces.
Des nageoires au menu du jaguar
Une nouvelle étude révèle une augmentation importante du nombre de tortues dévorées par des jaguars dans le parc national Tortuguero, constitué de forêts tropicales et d’habitats marins.
Les attaques ont lieu la nuit, lorsque les tortues vertes arrivent sur les plages pour y déposer leurs œufs. Quittant le couvert de la jungle, les jaguars affamés tuent les reptiles d’une morsure à la gorge, avant de les trainer vers la forêt pour dévorer leurs nageoires et la chair de leur cou.
Diego Verissimo, chercheur pour l’ONG Global Vision International et principal auteur de l’étude, souligne l’ampleur du phénomène:
« Au cours des dernières années, nous avons assisté à près de 200 cas par an de prédation de tortues par des jaguars. »
La tortue verte, principale victime
Dans 99% des cas, il s’agit de tortues vertes (Chelonia mydas). Sont également dénombrées 3 tortues imbriquées (Eretmochelys imbricata) et une tortue luth (Dermochelys coriacea) parmi les 676 attaques de tortues marines documentées.
Si ce type d’interactions entre ces espèces a déjà été observé dans les années 50, la fréquence des agressions augmente de manière inquiétante, sans que les spécialistes parviennent à l’expliquer. Diego Verissimo affirme:
« Il y a plusieurs possibilités. L’une des explications possibles pourrait être la dégradation de l’habitat, qui oblige les jaguars à se déplacer vers la côte. Une autre hypothèse penche pour la diminution du nombre de proies comme les pécaris et les cerfs, en raison de la chasse illégale. »
Préserver l’habitat plutôt que l’espèce
Également menacés par la déforestation et le braconnage, les jaguars voient leur territoire rapetisser d’année en année.
La situation de la tortue verte est plus préoccupante encore, en raison de la pêche accidentelle et du ramassage illégal d’œufs sur les plages où elles viennent pondre.
Lancée par le ministère de l’Environnement costaricain, l’étude devra déterminer si les attaques des jaguars mettent la survie des tortues marines en péril. Les scientifiques devront apprendre à mieux connaître les populations de félins vivant près des côtes.
Diego Verissimo espère que ces interactions entre deux espèces emblématiques de la biodiversité américaine permettront de promouvoir une approche différente de la préservation, axée sur l’habitat et plus seulement sur les espèces.