La création d’enclaves autonomes où pourront s’installer les entreprises étrangères est considérée par de nombreux honduriens comme une atteinte à la souveraineté nationale. Ces villes modèles censées contribuer au développement possèderaient leurs propres lois et leur propre police.
Quand le rêve des « villes privées » tourne au cauchemar
La création d'enclaves autonomes où pourront s'installer les entreprises étrangères est considérée par de nombreux Honduriens comme une atteinte à la souveraineté nationale. Ces villes modèles censées contribuer au développement possèderaient leurs propres lois et leur propre police.
Une indépendance quasi-totale
Début 2011, le parlement hondurien modifiait sa constitution pour permettre la création de zones de développement autonomes, ouvertes aux capitaux étrangers. Un an et demi plus tard, les premiers investisseurs arrivent, mais cette dérégulation destinée à attirer les multinationales au Honduras ne fait pas l’unanimité.
L’objectif affiché par le gouvernement est la lutte contre la pauvreté, grâce à une création massive d’emplois. Pour cela, les Régions de Développement Spéciales (RED) jouiront d’un statut territorial spécifique leur permettant de gérer de manière autonome leur statut juridique, ainsi que leurs systèmes administratif et migratoire.
Les villes modèles pourront également mettre en place leur propre système fiscal afin de passer des accords économiques en toute indépendance.
Mais pour certains juristes, comme l’explique l’ex-procureur Jari Dixon, ce décret parlementaire est contraire aux principes de la République :
« Dans les RED, on voit apparaître des pouvoirs autonomes tenant lieu à la fois de pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, ce qui est totalement anticonstitutionnel. De plus, en remettant des parties du territoire national entre des mains étrangères pour des périodes indéfinies, la souveraineté nationale est bafouée. »
Quel impact pour les populations locales ?
De nombreux secteurs de la population partagent ces craintes, en particulier les communautés dont les territoires pourraient être concernés par l’implantation des RED.
Miriam Miranda, coordinatrice de l’Organisation Fraternelle Noire Hondurienne (OFRANEH), affirme que les zones autonomes menacent 24 communautés Garifunas, ainsi que le peuple Mosquito et les familles de paysans de la côte atlantique :
« Ce décret n’attente pas seulement à la souveraineté nationale, mais permet la création d’un véritable État dans l’État, sans aucune consultation des populations qui seront affectées par le projet et vivent dans ces régions. »
Selon l’OFRANEH, des pourparlers auraient déjà commencé entre le gouvernement et l'entreprise coréenne Pohang Iron and Steel Company (POSCO), troisième entreprise métallurgique mondiale.
Pour la dirigeante Garifuna, les RED ne sont finalement qu’une forme de « colonialisme déguisé », permettant aux capitaux internationaux de s’installer dans des zones où sont concentrées les ressources naturelles du pays :
« Au nom du développement, le Honduras est à vendre. »