Qatar : les travailleurs migrants entre sueur et sang dans le pays le plus riche du monde

Le Qatar, le pays le plus riche au monde pour le revenu par habitant, est un parmi ceux où les conditions de vie des immigrants sont les pires. Diverses organisations de défense et de promotion des droits de l’homme ont dénoncé leurs conditions de travail, les qualifiant de forme d’esclavage. Reportage de Global Voices.

Par Pauline Hossin Modifié le 8 mars 2014 à 7 h 25

Le Qatar, le pays le plus riche au monde pour le revenu par habitant, est un parmi ceux où les conditions de vie des immigrants sont les pires. Diverses organisations de défense et de promotion des droits de l'homme ont dénoncé leurs conditions de travail, les qualifiant de forme d'esclavage. Reportage de Global Voices.

© REUTERS

Le Qatar, petit pays du Golfe, …

Sur divers plans, le Qatar, petit pays du Golfe, exerce une activité inversement proportionnelle à la superficie de son territoire ou au volume de sa population autochtone. Pour poursuivre cette politique, il use de plusieurs moyens. Premier d'une longue série, la chaîne de télévision Al Jazeera, qui a démontré un grand professionnalisme en plusieurs occasions, en particulier durant les révolutions qui ont entraîné la chute des régimes corrompus et impitoyables dans plusieurs pays arabes.

Sur le plan diplomatique, les négociations internationales de Doha sur la libéralisation du commerce mondial, bien qu'avortées, ont donné au pays une exposition médiatique mondiale pour plusieurs années. Sur le plan sportif, il sponsorise des équipes dans diverses disciplines, dont les plus fameuses du monde, en particulier le football. Au cours de la dernière décennie, il a accueilli une moyenne de trois événements sportifs à caractère international. Ce sera ainsi le Qatar qui accueillera la Coupe du Monde après le Brésil.

Sur le plan scientifique, l'État du Qatar a signé des contrats avec de nombreuses universités étrangères, qui ont ouvert des sièges à Doha, la capitale. En outre, le musée des arts islamiques connaît déjà une renommée internationale grâce à ses œuvres provenant de diverses parties du monde.

Tout ceci pourrait faire penser que le Qatar est un pays où tous vivent en pleine jouissance de leurs droits. La réalité derrière cette belle image est au contraire toute autre pour les travailleurs migrants. Ceux-ci ont contribué à la prospérité de ce pays, mais ils en restent exclus.

…et ses citadins les plus riches du monde

Selon les données du Rapport 2013 sur la richesse au Moyen-Orient publié par la Qatar Financial Center Authority, il y a plus de 4 000 millionnaires au Qatar, sur une population locale de quelque 300 000 qatari, et 290 habitants sont ultrariches c'est-à-dire qu'ils possèdent un patrimoine de plus de 30 millions de dollars.

L’émirat possède le PIB par habitant le plus élevé du monde, plus de 100 mille dollars selon les données du Fonds Monétaire International , grâce aux 77 millions de tonnes de GNL (Gaz Naturel Liquide) que le pays extrait chaque année de la troisième plus grande réserve de gaz du monde.

Le travailleur migrant, le nouvel esclave

À côté de cette richesse, au contraire, les mauvaises conditions de travail des immigrants ont été dénoncées par plusieurs organisations de la société civile internationale.

Selon la Fédération international des droits de l'homme, la Fidh :

« Les conditions de travail pour les travailleurs migrants, notamment sur les projets associés à la Coupe du monde, sont si mauvaises qu’elles s’apparentent parfois à du travail forcé. Les pratiques incriminées comprennent la servitude pour dette, la confiscation du passeport par l’employeur, la surpopulation et l’insalubrité des lieux d’hébergement des travailleurs, l’absence de contrats et les déductions arbitraires de salaires. Les travailleurs s’exposent également à un risque mortel en construisant les infrastructures de la Coupe du monde par des températures atteignant parfois 55°C. D’après les chiffres du gouvernement népalais, 191 travailleurs népalais seraient morts dus à ces conditions de travail en 2010, et 162 lors des 10 premiers mois de 2011. De plus, la loi du Qatar interdit aux travailleurs migrants de former des syndicats. »

De son côté, Amnesty International révèle dans un rapport les cas de travailleurs subissant du chantage de la part de leurs employeurs. Les chercheurs de l'organisation pour les droits de l'homme ont vu de leurs yeux 11 hommes signer des documents devant des fonctionnaires du gouvernement par lesquels ils déclaraient – faussement -, avoir reçu leur salaire pour récupérer leurs passeports et pouvoir ainsi quitter le Qatar.

“Plus de 4000 travailleurs risquent de perdre la vie dans les sept prochaines années de construction des installations si personne n'intervient pour donner des droits aux travailleurs migrants. Le nombre de morts parmi ceux qui travaillent sur des chantiers pourrait s'élever à 600 en un an – presque douze en à peine une semaine”, explique Sharan Burrow, Secrétaire Générale de l'International Trade Union Confederation.

Les pressions internationales (de la part de l'ONU, de l'UE, des ONG humanitaires, d'organisations syndicales et de simples footballeurs) se multiplient sur le Qatar afin que les conditions des travailleurs étrangers s'améliorent, et sur la FIFA pour lui demander de réaffecter les mondiaux de foot de 2022.

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