La Ville de Paris a présenté devant la presse, le 2 avril, un outil baptisé BiodivScore, censé évaluer l’impact écologique des projets immobiliers. Cette initiative s’inscrit dans le cadre du troisième plan biodiversité de la capitale, qui sera examiné en Conseil de Paris le 9 avril. En toile de fond : un objectif affiché de réconcilier urbanisme et biodiversité, quitte à bousculer les habitudes des promoteurs, architectes et collectivités.
Paris lance un outil pour intégrer la biodiversité dès la conception d’un projet immobilier

Biodiversité : un outil d’autoévaluation des projets immobiliers
Faire de la biodiversité un critère incontournable dès la conception d’un bâtiment, voilà l’ambition affichée de la mairie. Présenté comme « incitatif » mais clairement pensé pour s’imposer dans les faits, le BiodivScore se veut la clef de voûte de cette stratégie. Selon Christophe Najdovski, adjoint à la maire de Paris, interrogé par Actu-Environnement : « il faut faire en sorte d’intégrer la biodiversité dès l’amont des projets de construction ou de rénovation, comme on le fait déjà pour le climat ».
Inspiré de la logique éviter, réduire, compenser, l’outil repose sur quatre piliers : potentiel d’accueil du vivant avant et après chantier, intégration écologique dès la conception, gestion durable, et limitation des impacts des travaux. En somme, un calculateur de performance écologique, accessible en ligne via un téléservice, et qui attribue un score au projet. Ce score, obtenu via un questionnaire, permet au porteur de projet de choisir, parmi une liste prédéfinie, les configurations applicables (nombre de strates végétales, présence d’un écologue, labels de gestion…). À la clef : des bonus pour les démarches vertueuses, des malus pour les autres. La Ville précise : « le but n’est pas de sanctionner, mais bien d’accompagner vers des pratiques respectueuses du vivant ».
Projet immobilier à Paris : vers un urbanisme à biodiversité positive ?
Le plan biodiversité 2025-2030, dans lequel s’inscrit le BiodivScore, affiche des objectifs concrets : végétaliser quarante hectares supplémentaires de bâti d’ici 2030, et faire en sorte que la moitié des projets parisiens incluent toits ou façades végétalisés. Ce n’est pas une lubie verte, c’est une doctrine urbaine. En novembre 2024, Paris adoptait déjà le premier Plan Local d’Urbanisme bioclimatique de France. Le BiodivScore prolonge cette logique. Mais la généralisation ne s’arrête pas aux intentions. Le plan fixe que 100 % des projets municipaux et des bailleurs sociaux éligibles devront utiliser l’outil.
Et si l’usage reste officiellement facultatif, des subventions pourraient être conditionnées à son utilisation dans certains cas. Autrement dit : tout le monde est incité à s’y plier. Le groupe d’opposition Changer Paris, lui, dénonce un verdissement de façade. Selon ses élus, la Ville confond végétalisation et biodiversité réelle : « Cela se traduit par l'installation de plantes en pots (comme certaines rues-jardins) qui auront un impact limité là où les plus grands potentiels sont régulièrement ignorés par la Ville : les espaces verts et les bois », peut-on lire sur le site Actu-Environnement.
Environnement : un chantier parisien ambitieux… et inégal
Ceux qui applaudissent la démarche, comme France Nature Environnement Île-de-France, attendent surtout de voir si l’outil sera effectivement utilisé par les promoteurs. Yves Jouanique, coprésident de l'association, reconnaît que « c'est une initiative qui va dans le bon sens », mais souligne que son succès dépendra de l'appropriation par les professionnels du secteur. En réalité, l’outil vient combler un vide : 95 % des projets à Paris échappent à toute évaluation environnementale formelle.
Le BiodivScore agit donc comme un garde-fou minimum. Le Plan biodiversité 2018-2024, dont le bilan a été publié en septembre 2023, indiquait déjà cette carence et proposait un outil pour évaluer ces projets en intégrant la notion de diagnostic écologique dès l'amont (Bilan du Plan Biodiversité 2018-2024, Ville de Paris). De fait, la Ville tente de mettre en cohérence tout son arsenal réglementaire. Elle inscrit la biodiversité dans son Plan Local d’Urbanisme, renforce la protection des arbres et des trames vertes, et conditionne ses achats publics à des critères écologiques stricts. L’ensemble forme une stratégie structurée et ambitieuse.