Les géants de la junk food doivent-ils nous apprendre à manger ?

En 20 ans, la cuisine traditionnelle a quasiment disparu au profit des aliments industriels, qui représentent aujourd’hui 50 % de la consommation.

Par Mathieu Viviani Modifié le 21 juin 2013 à 11 h 35

En 20 ans, la cuisine traditionnelle a quasiment disparu au profit des aliments industriels, qui représentent aujourd’hui 50 % de la consommation. Les spécialistes dénoncent l’hypocrisie des « croisades contre la faim » menées par des groupes comme Pepsico ou Nestlé, dont les produits sont les principaux responsables de l'obésité galopante qui sévit au Mexique.

© Bill Branson

Le renard veille sur le poulailler

La richesse de la cuisine mexicaine, héritière d’une culture millénaire, n’a pas résisté pas aux assauts des « snacks » et autres boissons gazeuses, qui ont réussi en seulement 20 ans à bouleverser les habitudes alimentaires de tout un pays. Aujourd’hui, les repas des Mexicains sont constitués pour moitié de produits industriels, tandis que l’obésité et le diabète sont devenus des problèmes majeurs de santé publique.

Dans ces conditions, il est pour le moins hypocrite de laisser participer des multinationales comme Pepsico et Nestlé à des campagnes contre la faim, estime Enrique Jacoby, conseiller régional pour l’alimentation saine et la vie active à l’Organisation panaméricaine de la santé (OPS).

« Ces entreprises élaborent des produits extrêmement addictifs : leur haute teneur en sucre est responsable du grand nombre de maladies cardiaques et de diabètes que nous détectons. C’est comme si nous laissions le renard garder le poulailler », s’indigne le spécialiste.

7 Mexicains sur 10 sont en surpoids

Alors qu’une partie importante de la population souffre encore de l’insécurité alimentaire, les géants de la junk food produisent principalement des denrées trop pauvres sur le plan nutritionnel, mais très riches en sucre, en graisse et en sel.

« Ce ne sont pas des aliments, mais des produits industriels. Les aliments, c’est à la campagne qu’on les produit. […] Le plus choquant, c’est que cette population que l’on considère menacée par l’insécurité alimentaire présente des taux d’obésité et de surpoids identiques au reste du pays », explique Enrique Jacoby.

Au Mexique, ces problèmes concernent 3 enfants sur 10 et la proportion grimpe à 7 sur 10 pour la population adulte.

Le retour des haricots et des tortillas

« Nul besoin de leur apprendre comment manger, il faut simplement leur offrir une protection pour qu’ils ne mangent pas n’importe quoi. Les produits industriels, c’est justement ça : n’importe quoi. »

Pour préserver les traditions culinaires et encourager le retour d’aliments comme les haricots ou les tortillas, les spécialistes estiment nécessaire de modifier l’environnement de consommation et la disponibilité des différents types d’aliments.

Les espoirs se tournent désormais vers le programme national de prévention et de lutte contre le surpoids, l’obésité et le diabète, que devrait bientôt présenter le président Enrique Peña Nieto. L’initiative prévoit notamment la mise en place d’une réglementation de la publicité conforme aux objectifs de santé publique, ainsi qu’une modification de l’étiquetage des aliments.

Aucun commentaire à «Les géants de la junk food doivent-ils nous apprendre à manger ?»

Laisser un commentaire

* Champs requis

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.