Les opposants à l’exploitation minière ne désarment pas et convoquent une grande marche nationale pour l’eau le 27 janvier prochain. Un projet aurifère met en péril les maigres ressources hydriques de la région de Cajamarca …
L’eau, plus précieuse que l’or?
Les opposants à l’exploitation minière ne désarment pas et convoquent une grande marche nationale pour l’eau le 27 janvier prochain. Un projet d’exploitation aurifère met en péril les maigres ressources hydriques de la région de Cajamarca et suscite la colère des habitants.
De l’or ou de l’eau ? Le président Ollanta Humala est sommé par les Péruviens qui l’ont élu de se décider au plus vite. Faute de quoi il risque de devoir affronter la colère de son peuple. Un choix difficile pour ce dirigeant élu grâce au soutien des classes sociales les plus marginalisées. Il sait que l’économie de son pays repose en grande partie sur l’exploitation minière. Avec des recettes estimées à 15 milliards de dollars pour 2010, celle-ci représente en effet 7% du PIB.
D'importantes retombées économiques
Au cours des dernières décennies, le pays est devenu le cinquième producteur mondial de métal jaune et exploite la deuxième mine d’or la plus grande de la planète à Yanacocha, dans la région de Cajamarca. La compagnie américaine Newmont et son partenaire local Buenaventura, principaux propriétaires de Yanacocha, veulent aller plus loin en investissant près de 5 milliards de dollars pour un nouveau projet aurifère dans la zone de Conga, à quelques kilomètres de là. S’il voit le jour, ce site pourrait produire dès 2014 entre 580 000 et 680 000 onces d'or par an, et générer d’importantes retombées économiques pour Cajamarca.
Mais les habitants de cette région désolée sont attachés à un autre trésor, bien plus précieux encore dans ce milieu aride : l’eau douce.
La mine assèchera quatre lacs andins
Selon le rapport d’impact environnemental approuvé par le gouvernement précédent, le projet Conga implique la destruction de quatre lacs, connectés à la nappe phréatique alimentant la principale source d’eau de la région. Divers bassins fluviaux pourraient également être irrémédiablement pollués par l’utilisation du mercure et du cyanure.
De quoi inquiéter sérieusement la population locale, d’autant plus les antécédents de l’entreprise Newmont ne jouent pas en sa faveur. En juin 2000, l’un de ses camions a répandu 100 kilos de mercure le long d’une route de 45 kilomètres dans une zone proche de Yanacocha, et l’entreprise a tout fait pour minimiser l’accident. Malgré les graves problèmes de santé dont ont souffert près d’un millier de personnes, Newmont s’en était alors tiré avec une amende dérisoire de 500 000 dollars.
Une marche pour l'eau
Aujourd’hui, la population de Cajamarca privilégie la défense de ses ressources en eau, et compte avec un allié de taille dans sa lutte contre les géants de l'industrie minière. Il s’agit du président de la région, Gregorio Santos, qui estime que la situation deviendra « explosive » si le projet Conga n’est pas abandonné et n’hésite pas à qualifier Ollanta Humala « d’otage du capitalisme international ». Aux manifestations massives qui secouent la ville de Cajamarca depuis des mois, menacent de s’ajouter des protestations à l’échelle nationale, avec notamment un appel à une marche pour l’eau à travers tout le pays le 27 janvier prochain.
Ollanta Humala fait de son mieux pour convaincre les Péruviens qu’il est possible de concilier intérêts économiques et défense de l’environnement et des communautés locales, mais il risque d’avoir du mal à soutenir cette position ambiguë longtemps encore.
Aujourd’hui, 70% de l’or produit dans le monde provient de pays en voie de développement. La multiplication par quatre du prix de l’or au cours des dix dernières années a rendu rentables les projets les plus insensés, et les pays en développement n’hésitent pas à sacrifier leur environnement pour toucher quelques royalties.