L’Afrique est à la fois le continent le plus à même de se barder de panneaux photovoltaïques, et le moins susceptible de le faire. Ce paradoxe s’explique par le taux d’ensoleillement exceptionnel de l’endroit et son extrême pauvreté.
L’Afrique, futur parangon du photovoltaïque ?
L'Afrique est à la fois le continent le plus à même de se barder de panneaux photovoltaïques, et le moins susceptible de le faire. Ce paradoxe s'explique par le taux d'ensoleillement exceptionnel de l'endroit (son exposition moyenne est comprise entre 5 et 7 kWh/m2) et son extrême pauvreté (le PIB du continent représente l'équivalent de 2,62 % du PIB mondial, soit l'équivalent du PIB du Canada, qui compte moins de 35 millions d'habitants, quand l'Afrique en totalise plus d'un milliard).
Continent le plus ensoleillé du monde, il pourrait potentiellement produire une énergie thermique et/ou électrique bon marché. Problème, il est aussi le plus pauvre, or l'installation de capteurs solaires coûte cher. Insoluble ? De plus en plus d'entrepreneurs veulent croire que non.
Le développement de l'Afrique passe par son électrification. Vecteur de progrès important, elle est pour le moment marginale sur le continent, puisque plus des deux tiers de la population subsaharienne n'ont pas accès à l'électricité. Un chiffre qui atteint les 85% s'agissant des habitants des zones rurales.
Le solaire, comme une évidence, pourrait contribuer à remédier à cet état de fait. Il semble d'autant plus opportun que l'Afrique se caractérise par d'immenses zones à la densité de population faible, difficiles à raccorder au réseau. Tout semble donc inciter les pays africains à avoir recours à de micro-réseaux autonomes et intelligents, ou microgrids, schémas privilégiés dans le cadre de l'installation de systèmes photovoltaïques.
Encouragés par diverses ONG, ou par des programmes de microcrédits, certains pays ont déjà sauté le pas. C'est le cas de Madagascar, où des panneaux solaires ont été installés sur des hôpitaux, pour leur éviter le blackout lors des (fréquentes) coupures de courant. Au Ghana et au Burkina-Faso, on a voté des incitations fiscales et lancé des micro-financements remboursables sur plusieurs années, afin d'inciter la population à s'équiper de kits solaires. Au Rwanda, une microcentrale solaire a été mise en activité en 2007. En Ouganda, Village Energy incite les ruraux à confectionner leurs propres réseaux photovoltaïques domestiques.
Autant d'initiatives portées à bout de bras par les acteurs locaux, témoignant d'une réelle envie d'évoluer, mais encore trop largement sporadiques. Pour faire un bond véritable, l'Afrique a besoin d'attirer les investisseurs étrangers, de créer une filière du photovoltaïque. Elle commence à s'y mettre. Au Maroc et au Sénégal par exemple, la firme espagnole Trama TecnoAmbiental a investit plusieurs millions, pour multiplier les microgrids.
Mais ce n'est rien à côté de Desertec, projet d'envergure mondiale ayant notamment pour ambition de tapisser de capteurs solaires une partie du Sahara à l'horizon 2050, afin de répondre à la demande de la quasi totalité de l'Afrique et d'une partie de l'Europe. Construire des centrales solaires en plein désert n'est pas une mauvaise idée, puisque chaque km2 de ces régions arides reçoit annuellement une énergie solaire équivalent à 1,5 millions de barils de pétrole. Autrement dit, il "suffirait" de couvrir 0,3 % des 40 millions de km2 de déserts que compte la Terre de panneaux pour pourvoir aux besoins électrique de toute la planète.
Ça a l'air simple. Ça l'est. Ça n'en a pas moins un coût d'installation. Il est estimé, pour une consommation annuelle moyenne de 128 kWh par habitant en Afrique de l'Ouest, à 750 euros par personne. Ça peut sembler élevé, ça l'est au regard du revenu moyen des habitants d'Afrique, c'est pourtant très rentable sur le long terme.
Si les investissements se font, et ne doutons pas qu'ils se feront, l'Afrique pourrait devenir la vitrine mondiale des énergies vertes. Gorgé d'un pétrole allègrement détourné vers les pays occidentaux, le continent ne profite guère de l'or noir. Qu'importe. L'aspect difficilement stockable et transportable sur de longues distances des énergies renouvelables devrait lui permettre de jouir en toute quiétude de cette autre manne, autrement plus propre.