Entrevue avec Marie-Monique Robin – Réalisatrice du documentaire "Mon poison quotidien"

Pour la 1ère canadienne du documentaire Notre poison quotidien, Green et Vert, de passage à Montréal, a rencontré la réalisatrice choc du Monde selon Monsanto.

Par GVadmin Modifié le 11 décembre 2012 à 17 h 15

Explications sur la DJA (Dose Journalière Acceptable) et les hormones de synthèse

G&V : Pouvez-vous nous en dire plus sur le DJA?

MMR : J’ai découvert que c’est René Truhaut, un toxicologue français très connu dans les années 1950-60, qui a eu cette idée. Le milieu du XXème siècle est une période où les produits chimiques arrivent en masse dans notre environnement et sans aucune réglementation. René Truhaut alerte donc du danger pour les consommateurs et de la nécessité de règlementer. L’idée est de déterminer quelle dose de poison peut être ingérée chaque jour sans tomber malade. Suivent ensuite des études toxicologiques sur des rats et des souris afin de déterminer une première norme appelée dose létale ou DS50. La dose est progressivement diminuée jusqu'à trouver une dose sans effet toxique observée au bout de 90 jours. Ce qui est peu, puisque 90 jours pour un rat ou une souris correspondent à 45 ans pour les hommes. C’est une première critique que l’on peut faire.

René Truhaut et ses collègues décident alors qu’à cette dose sans effet toxique observé il faudrait appliquer un facteur de sécurité. Ils divisent donc cette dose par 10. Puis pour les femmes enceintes et les enfants qui sont plus sensibles, ils la redivisent  par 10. Au bout du compte, il a été établi de manière totalement arbitraire de diviser la dose sans effet toxique observé par 100. On obtient alors une norme (en milligramme) de substances chimiques par kilo de poids corporel : 0,1 mg/kg. Une personne qui pèse 60kg pourra ingérer 6 mg par jour sans tomber malade - soi disant. Tous les produits testés ont une DJA quand les études sont bien faites par les fabricants. Toute une partie de mon livre démontre que c’est souvent du grand n’importe quoi. L’aspartame est l’exemple que je décris pour montrer cette aberration ! En plus, on découvre que leurs données toxicologiques sont couvertes par le secret commercial. Personne ne peut avoir accès aux données brutes.

G&V : Comment savoir si le consommateur atteint cette DJA ou pas ?

MMR : Cela dépend de ce qu’il mange, où il habite, etc. Un végétarien par exemple va manger beaucoup plus de fruits et de légumes. Une nouvelle norme complémentaire à la DJA a été inventée : la limite maximale de résidus autorisés (LMR). Les fabricants doivent faire des essais en champs et mesurer après récolte le taux de résidus sur leurs fruits et légumes pour établir des modèles. On établit combien un Européen moyen mange de fruits par jour pour en faire une moyenne et ensuite on calcule s’il n’atteint pas la DJA.

C’est un système inouï qui est en fait un système d’empoisonnement quotidien à petite dose. Et deux problèmes fondamentaux ne sont pas pris en compte par cette règlementation : l’effet cocktail (les mélanges des résidus entre eux comme pour les médicaments en pharmacie) et les effets à faible dose. Tout le principe de la DJA est basé sur la toxicologie traditionnelle qui dit qu’il existe une dose sans danger. Ça peut marcher pour certaines molécules mais pas pour toutes. Du coup la DJA ne sert à rien, c’est ce que l’on appelle les perturbateurs endocriniens (les hormones de synthèse).

G&V : Quel est le problème concernant les hormones de synthèse ?

MMR : Ce sont des molécules qui miment nos hormones et sont intégrées partout dans notre quotidien. Les recherches montrent, depuis les 15 dernières années, que ces molécules agissent à très faible dose. Et lorsqu’un organisme vivant, notamment un fœtus, est exposé à une très forte dose d’hormones exogènes, cela va bloquer la « machine » et il n’y aura pas d’effets - l’hormone étant un messager qui va s’accrocher à un récepteur.

Par contre si la dose est similaire ou proche à celle de l’hormone naturelle, elle mime exactement l’hormone naturelle, et vous allez provoquer des effets qui vont endommager tout le système de développement du fœtus et vont provoquer ce que l’on appelle maintenant aux États-Unis : l’origine fœtale des maladies de l’adulte c'est-à-dire les maladies que l’adulte développe à 30 ou 40 ans mais qui sont déjà programmées dans le corps de la mère. Elles sont souvent dues aux hormones de synthèse qui agissent à très faible dose et qui n’ont jamais été testées. C’est un énorme défi car ce n’est pas que la dose qui fait le poison, comme on pensait toujours, mais le moment de l’exposition.

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