Depuis les années 80, les femmes de leaders indigènes brésiliens s’intéressent à la cause de leur peuple. A cette époque, la lutte concernait la démarcation des terres et les voix des femmes étaient totalement absentes des débats.
Dans les tribus d’indiens, les femmes prennent le pouvoir
Letícia Yawanawá, 49 ans, et Nazaré Apurinã, 48, sont des femmes de leaders indigènes brésiliens. Depuis les années 80, elles s'intéressent à la cause de leur peuple. A cette époque, la lutte concernait la démarcation des terres et les voix des femmes étaient totalement absentes des débats.
Letícia Yawanawá, femme d'un leader indigène, se souvient:
Dans les réunions, il y avait des femmes travaillant comme secrétaires, conseillères, mais toutes étaient blanches. C’est alors que nous avons réfléchi à notre participation.
Nazaré Apurinã, 48 ans, affirme:
La tradition ne nous laissait aucune autonomie dans les tribus. Mais quand les chefs partaient en ville participer à des réunions, nous gérions tout. Nous ressentions le besoin de nous faire entendre.
Une première incompréhension
Les débuts n'étaient pas faciles. Apurinã explique que les hommes ont pris cette initiative comme un affront. Pour apaiser leur méfiance, elles les ont invités à leur premier grand « meeting » en 1998, réunissant 200 indiennes. Apurinã commente:
"Nous voulions montrer que notre objectif n’était pas de les concurrencer, mais d’unir les forces."
Six ans plus tard, est créée l’Organisation des Femmes Indigènes de l’Acre, Sud d’Amazonas et Nord-est de Rondônia, dont Apurinã est la coordinatrice, assistée par Yawanawá.
Après 16 années de lutte, elles estiment que la situation des femmes dans les tribus laissent encore à désirer. Malgré tout, il y a des femmes caciques et elles réussissent à peser sur les décisions.
"C’est difficile de laisser un enfant au village, avec son père, pour participer d’une réunion en ville. Mais cela commence déjà à se faire. Ce mouvement nous a fait sortir de nos murs."
En 2005, l’UNI, principale organisation politique des indiens, est dissoute après des détournements d’argent destiné à la santé indigène. C’est alors que les femmes ont assumé le leadership du mouvement.
Des valeurs importantes
La santé est leur principal cheval de bataille. Elles critiquent le manque de médicaments et les visites trop rares des agents de santé dans les tribus. Si un Indien a besoin de soins et va à l’hôpital, un diagnostic est très difficile à établir s'il ne parle pas correctement portugais.
Elle cite les problèmes d’assainissement des eaux et la pollution des fleuves pur expliquer le fort taux de maladies parmi les indiens. L’éducation pose également problème: seules 10% des tribus ont des classes de niveau collège. Apurinã raconte:
"On n’aide pas les jeunes à aller à l’Université. Celui qui part en ville doit se débrouiller seul. Il doit faire des ménages pour gagner un peu d’argent. Souvent, il finit par rentrer à la tribu avant d’avoir terminé son cursus."
Certaines femmes engagées ont reçu des propositions pour rejoindre des partis et des gouvernements:
"Nombreuses sont celles à qui le gouvernement a proposé un salaire en échange de leur silence. Mais, dans les tribus, les gens nous disent: vous êtes notre espoir. Cela nous donne des forces."