Depuis 2021, intégrer les enjeux climatiques dans les Plans Locaux d’Urbanisme (PLU) est une obligation inscrite dans la loi. Pourtant, cette réforme essentielle reste largement inappliquée. Les documents d’urbanisme, qui façonnent l’aménagement de nos territoires, ignorent encore trop souvent leur impact sur les émissions de gaz à effet de serre. En cause : un manque de moyens financiers, d’expertise technique et une perception erronée de cette mesure comme une contrainte bureaucratique.
Climat et urbanisme : une obligation souvent négligée dans les PLU
Des obligations peu respectées
Depuis 2021, les documents d’urbanisme, comme les PLU, doivent inclure une évaluation des impacts sur le climat. Une contrainte rarement respectée : neuf PLU sur dix en Hauts-de-France n’évaluent pas les émissions liées à l’artificialisation des sols. À l’échelle nationale, le constat est similaire. Ces manquements révèlent un retard alarmant dans la prise en compte des enjeux climatiques.
La quantification des émissions de CO₂ est souvent perçue comme une obligation administrative plutôt qu’un outil stratégique. Philippe Gratadour, président de l’Autorité environnementale des Hauts-de-France, déplore que l’enjeu climatique reste absent des priorités locales. Résultat, la gestion des sols, capitale pour limiter les émissions, est négligée. Pourtant, chaque hectare artificialisé aggrave le bilan carbone du territoire.
Un manque de moyens et d’expertise
Les collectivités peinent à intégrer le climat dans leurs PLU faute de moyens. Les études nécessaires, complexes et coûteuses, sont souvent réalisées à la hâte. « Ce qui manque aujourd’hui, c’est du financement », explique Anne Lefranc, experte en aménagement dans des propos partagés par le site Reporterre. Les budgets locaux ne permettent pas de recruter des spécialistes ou de financer des outils d’évaluation performants.
Des solutions existent, comme l’outil Ges Urba ou la démarche Muse, mais elles restent sous-utilisées. Le problème ? Leur précision limitée. « Il n’existe pas de données qualitatives sur les sols à l’échelle de la parcelle cadastrale, qui est celle des PLU. On n’a des données que par carreaux de 16 km par 16 km, et elles ne sont actualisées que tous les 10 à 15 ans », déplore Jean Guiony de l’Institut de la transition foncière. Sans informations fiables à l’échelle des parcelles cadastrales, il est difficile de prendre des décisions éclairées.
Repenser l’urbanisation pour protéger le climat
Tous les sols n’ont pas le même impact climatique. Défricher une forêt ou urbaniser une prairie libère bien plus de CO₂ que bâtir sur une friche. Pourtant, ces différences ne sont pas suffisamment prises en compte. Mieux connaître les sols pourrait orienter les élus vers des projets moins émetteurs et préserver des hectares précieux pour le stockage de carbone.
Pour dépasser ces obstacles, des évolutions réglementaires s’imposent. Jean Guiony plaide pour des études de sol obligatoires lors de chaque transaction foncière, à l’image des diagnostics énergétiques pour les logements. De plus, il appelle à une réforme de la fiscalité, encore trop favorable à l’artificialisation des terres agricoles.