La start-up californienne Aptera a franchi, le 5 avril 2025, une étape médiatique et technologique de taille : faire rouler un prototype de voiture électrique solaire sur plus de 480 kilomètres le long de la mythique Route 66, sans aucune recharge. Ce périple, annoncé comme une avancée décisive vers une mobilité plus propre et autonome, remet sur le devant de la scène la voiture électrique solaire, un concept aussi fascinant qu’épineux. Entre espoir d’un nouveau paradigme énergétique et scepticisme alimenté par les performances réelles, que faut-il vraiment retenir de cette opération ?
Aptera : 480 kilomètres sans recharge pour sa voiture électrique solaire

La voiture électrique solaire Aptera a parcouru 480 km sans recharge
Aptera Motors, relancée en 2020 après une faillite en 2011, s’est donnée pour mission de révolutionner le transport individuel avec une voiture électrique solaire ultra-efficiente. Le modèle testé récemment, une trois-roues fuselée au design aérodynamique radical (Cx de 0,13), a parcouru 480 kilomètres sur la Route 66 entre Flagstaff (Arizona) et Imperial Valley (Californie), intégralement alimentée par ses panneaux solaires.
Le cofondateur de la marque, Steve Fambro, a lui-même pris le volant pour cette odyssée solaire. Selon ses propos rapportés dans Automobile Propre : « Presque toutes les personnes que nous avons croisées sur notre chemin avaient sorti leur téléphone pour nous filmer ». Un engouement visuel qui ne doit pas masquer les limites techniques de l’expérience.
Une autonomie encore en chantier pour la voiture électrique solaire
Aptera promet, sur le papier, jusqu’à 1 600 kilomètres d’autonomie grâce à des batteries modulables couplées à des cellules solaires de 700 W. Mais les chiffres réels diffèrent. La voiture n’a couvert que 480 kilomètres lors de son test, bien loin de la promesse maximale, et ce malgré une génération solaire de 545 watts, relevée même sous un ciel couvert. L’entreprise indique qu’en théorie, les panneaux peuvent générer l’équivalent de 64 kilomètres par jour.
Cependant, pour atteindre ses objectifs, la voiture reste dépendante d’un port de recharge NACS (North American Charging Standard), standard développé par Tesla. En somme, l’énergie solaire ne suffit pas à elle seule à garantir une autonomie viable dans toutes les conditions, et l’auto reste tributaire des infrastructures classiques. Frandroid souligne une vérité brutale : « le prototype n’a parcouru que 480 kilomètres durant ce test. Ce qui prouve que la voiture électrique n’est pas encore totalement prête ». À cela s’ajoute le flou autour de la capacité exacte de la batterie, estimée entre 40 et 45 kWh, sans confirmation officielle.
Une prouesse technique à double tranchant : quelle viabilité pour la voiture électrique solaire ?
Si le road trip de l’Aptera sur la Route 66 constitue une démonstration réussie de résilience – entre nids-de-poule, vents du désert et routes en altitude –, il n’en reste pas moins une opération de séduction à l’intention des investisseurs. Car oui, malgré ses avancées techniques, la start-up est encore loin de produire en série : elle cherche toujours 60 millions de dollars (environ 56 millions d’euros) pour lancer la commercialisation de son modèle en 2025.
La version de lancement, proposée à 40 000 dollars (soit environ 37 000 euros), ne sera viable qu’à condition d’industrialiser rapidement la chaîne de production et de convaincre un marché encore frileux. Une version d’entrée de gamme à autonomie réduite (400 km) est aussi évoquée, sans aucune donnée de test vérifiée. Malgré cela, Aptera revendique son ambition d’un changement structurel de la mobilité. « Chaque kilomètre parcouru nous rapproche d’un avenir où les voyages seront alimentés par le soleil », peut-on lire sur le blog officiel de la marque. Une déclaration pleine d’idéalisme qui masque difficilement les incertitudes industrielles.