Le débat sur le nucléaire, très partisan, resurgit avec force. Alors que des manifestants s’opposent au quatrième site, l’organe de contrôle travaille à une législation pro-atome. Et les députés critiquent son analyse hâtive sur la gravité des radiations venant de Fukushima… Ira ou ira pas?
La situation japonaise relance un débat tumultueux sur le nucléaire.
Le débat sur le nucléaire, très partisan, resurgit avec force. Alors que des manifestants s’opposent au quatrième site, l’organe de contrôle travaille à une législation pro-atome. Et les députés critiquent son analyse hâtive sur la gravité des radiations venant de Fukushima…
Taïwan a trois centrales nucléaires en activité, construites dans les années 70 et 80 : deux à la pointe nord de l’île, une à sa pointe sud. Elles fournissent 20% de l’énergie consommée. Le quatrième site (usine de Longmen) est presque achevé, mais la crise japonaise pourrait lui mettre du plomb dans l’aile. Le 17 mars, des opposants ont organisé un sit-in devant le centre du pouvoir à Taipei. Après une prière pour les victimes du tsunami japonais, ils ont appelé à l’arrêt de la construction de l’usine de Longmen. Cui Suxin, un des leaders de la manifestation, a rappelé que la Suisse et la Thaïlande avaient déjà revu leur stratégie nucléaire au regard de la situation japonaise.
Taïwan n’a pas la capacité pour lutter contre une crise équivalente. L’usine de Longmen est une pagaille confiée à différentes sociétés, que le gouvernement devrait arrêter tout de suite.
Selon lui, plusieurs incidents industriels ont été constatés sur le site, et la société d’exploitation aurait unilatéralement changé 700 points du design la semaine dernière.
Mais Monsieur Cui sera certainement chagriné de voir que la position de l’administration est pro-atome, et que la situation à Fukushima ne semble pas suffisante pour faire changer les convictions…
Le conseil de l’énergie atomique (CEA) a en effet révélé qu’il prépare un projet de loi qui permettrait de faciliter la construction de sites de stockage des déchets nucléaires. Le sujet est délicat. Pour résoudre ce problème, Taïwan a par le passé négocié avec la Corée du Nord, la Chine continentale et les îles Salomon pour stocker ses déchets sur leurs terres. L’indignation de la communauté internationale qui en a résulté a stoppé ces projets.
Depuis, les déchets radioactifs continuent d’être stockés sur le site temporaire de l’île de Lanyu, aussi appelée l’île des orchidées. Et pour trouver un site définitif, la société Taipower, qui exploite les centrales de Taïwan, n’a pas hésité à corrompre les officiels des localités visées. Un voyage de luxe en Suède, sous le prétexte d’une ‘visite d’installations de traitement’ a été offert par l’entreprise à des élus locaux. L’indignation de plusieurs politiques a stoppé les dépenses de ‘lobby’, mais pas l’activité législative. Lai Kuncheng, un député du parti d’opposition (parti démocrate progressiste), s’indigne.
Taipower a depuis longtemps essayé de corrompre les officiels de la région de Taitung. Ce qu’ils font est antidémocratique et scandaleux.
Ces manœuvres en coulisse ne sont pas la seule raison de la colère qui monte contre le CEA et Taipower. Ainsi, les déclarations rassurantes du conseil prédisant que les fuites radioactives de Fukushima ne posaient pas de problème pour la santé des Taïwanais semblent un peu hâtives. Des députés du Kuomintang, le parti au pouvoir, se sont joints à ceux de l’opposition pour demander plus de clarté et de mesure de la part de l’administration. Dans ce contexte, pas sûr que les assurances, venant du même organe, prennent pour argent comptant le fait que les 3 centrales taïwanaises étaient sans risque.
Le chef du CEA a déclaré le 17 mars que les trois usines existantes, plus récentes que les unités japonaises, pouvaient résister aux catastrophes naturelles, fréquentes à Taïwan. Et qu’il n’était pas question de stopper la construction du quatrième site.
L’achèvement de la centrale de Longmen est nécessaire. Les installations sont sûres, et le combustible n’a pas encore été installé, car l’usine n’est pas encore en fonctionnement (…). Taïwan est dépendant des importations de pétrole et nous devons absolument continuer de diversifier nos sources d’énergie.
Il semble donc qu’il en faudra plus qu’un sit-in pour faire changer le pouvoir d’avis.